lundi 1 juin 2015

La peau

Curzio MALAPARTE
Couverture: Roland Topor
Quatrième de couverture

" Tu aimerais, dis, une petite fille à trois dollars, disais-je à Jack. 
— Shut up, Malaparte. 
— Ce n'est pas cher après tout, une petite fille pour trois dollars. Un kilo de viande d'agneau coûte bien plus cher. Je suis sûr qu'à Londres ou à New York une petite fille coûte plus cher qu'ici, n'est-ce pas, Jack ? - Tu me dégoûtes, disait Jack.  
—Trois dollars font à peine trois cents lires. Combien peut peser une fillette de huit à dix ans ? Vingt-cinq kilos ? Pense qu'un seul kilo d'agneau, au marché noir, coûte cinq cents lires, c'est-à-dire cinq dollars !"
Traduit de l'italien par René Novella.

Alors que nous vivons une époque où l'image est reine, où nous voyons tous les jours aux informations des images de guerres, des images de catastrophes plus ou moins naturelles, accompagnées  de commentaires le plus souvent insipides, nous sommes de plus en plus loin des malheurs de ce monde. Nous avons hélas banalisé le mal.
Alors que se préparent les commémorations pour le soixante-dixième anniversaire de l'armistice de la deuxième guerre mondiale, et que tous les jours ou presque défilent des images sordides d'hommes et de femmes faméliques, leur corps n'est plus que souffrance. 
Alors, oui j'ai eu l'idée de lire "La peau" de Malaparte. Je ne sais pas à quoi je m'attendais…Mais certainement pas à vivre l'horreur.

"Il y a une profonde différence entre la lutte pour ne pas mourir, et la lutte pour vivre."

Malaparte nous entrainent avec lui au milieu de ce peuple napolitain, au coeur même de cette Naples dévastée qui se prostitue pour survivre. Il est italien, il a rejoint le corps italien de la libération dès 1943 et combat aux côtés des alliés. Mais il est italien, et ne peut se défaire de cette impression, d'être vaincu. Il a honte mais comprend où la misère peut conduire. 
J'ai frissonné lorsqu'il raconte sa traversée au milieu de crucifiés juifs, j'ai aimé quand il raconte Febo, son chien, j'ai été happée par le Vésuve en éruption, j'ai souri quand il arrive à Castel Gandolfo, j'ai été triste quand il passe par son village natal, près de Florence. 
L'Europe dont parle ce roman n'est pas un continent, c'est un pays, un pays qui a perdu, mais on a l'étrange sentiment qu'il vaut mieux parfois être du côté des vaincus.
"—C'est une honte de gagner la guerre", dis-je à voix basse.
Ce n'est pas une lecture facile, mais c'est une lecture enrichissante. C'est très bien écrit.

2 commentaires:

  1. Je ne sais pas si ce livre me plairai mais de cet auteur, j'ai lu "Le Compagnon de voyage" que j'avais bien aimé.
    Bonne journée !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, j'ai lu ta critique du "compagnon de voyage" Céline.
      Ce roman ci est très dur, d'ailleurs c'est écrit comme un roman, mais ce n'est malheureusement pas un roman!

      Supprimer