dimanche 30 novembre 2014

La femme au miroir

Éric-Emmanuel SCHMITT
Couverture:Tamara de Lempicka (Girl with Gloves,1930)

Quatrième de couverture

     Anne vit à Bruges au temps de la Renaissance, Hanna dans la Vienne impériale de Sigmund Freud, Anny à Hollywood de nos jours. Toutes les trois se sentent différentes de leurs contemporaines; refusant le rôle que leur imposent les hommes, elles cherchent à se rendre maîtresses de leur destin.
     Trois époques. Trois femmes: et si c'était la même ?

Une seule héroïne pour trois époques différentes. 
Je n'ai pas particulièrement apprécié cette vision un peu trop uniforme de la féminité . Si elles sont différentes des femmes de leur époque, leur seule préoccupation semblent être bien égoïste. Qu'il s'agisse de "Anne", vivant au XVIème siècle, de "Hanna" qui découvre la psychanalyse, ou de "Anny", jeune starlette contemporaine, si elles veulent changer une chose, c'est juste leur vie. Je les ai trouvé insipides, leur "combat" ne fait en rien évoluer le monde autour d'elles. Elles ne le désirent même pas. 
On peut se laisser prendre à l'écriture de Schmitt, c'est d'ailleurs le huitième livre que je lis de lui, c'est plus fort que moi, j'ai tellement apprécié "Ulysse from Bagdad" que je suis toujours un peu déçue.

jeudi 27 novembre 2014

Au revoir là-haut

Pierre LEMAITRE

Couverture: Otto Dix (1913 Huile sur toile)

Quatrième de couverture

"Pour le commerce, la guerre présente beaucoup d’avantages, même après."
Sur les ruines du plus grand carnage du XXe siècle, deux rescapés des tranchées, passablement abîmés, prennent leur revanche en réalisant une escroquerie aussi spectaculaire qu’amorale. Des sentiers de la gloire à la subversion de la patrie victorieuse, ils vont découvrir que la France ne plaisante pas avec ses morts…
Fresque d’une rare cruauté, remarquable par son architecture et sa puissance d’évocation, "Au revoir là-haut" est le grand roman de l’après-guerre de 14, de l’illusion de l’armistice, de l’État qui glorifie ses disparus et se débarrasse de vivants trop encombrants, de l’abomination érigée en vertu.
Dans l’atmosphère crépusculaire des lendemains qui déchantent, peuplée de misérables pantins et de lâches reçus en héros, Pierre Lemaitre compose la grande tragédie de cette génération perdue avec un talent et une maîtrise impressionnants.

C'est avec tambours et trompettes que les peuples et leurs dirigeants fêtent les victoires. Quelles que soient les guerres, les gouvernements, les journalistes, les écrivains et les historiens vont s'emparer de la victoire, fêter leurs héros, ériger des monuments. Les profiteurs aussi, beaucoup s'enrichissent, quelques soient les guerres.
Pierre Lemaitre nous parle de la réinsertion plus ou moins réussie, plus ou moins honnête de soldats ayant vécu le dernier assaut de 14/18.
C'est bien écrit. Pierre Lemaitre nous décrit bien les manigances et manipulation de l'époque.
En revanche, il oublie complètement les femmes. Je n'ai pas trouvé dans ce roman une seule femme mise en valeur. Pourtant c'est après cette guerre, les hommes étant presque tous morts, estropiés ou traumatisés que les femmes ont du redresser le pays.
J'ai lu en août 2013 "Les labours de l'hiver" de Didier Cornaille, un roman qui traite de la même période et dénonce lui aussi des faits aussi graves que l'affaire des cercueils, avec des femmes mises en valeur.

mardi 25 novembre 2014

Un avion sans elle

Michel BUSSI
Couverture: Marion Tigréat

Quatrième de couverture:

23 décembre 1980. Un crash d’avion dans le Jura. Une petite libellule de 3 mois tombe du ciel, orpheline. Deux familles que tout oppose se la disputent. La justice tranche : elle sera Émilie Vitral. Aujourd’hui, elle a 18 ans, la vie devant elle mais des questions plein la tête. Qui est-elle vraiment ? Dix-huit ans que Crédule Grand-Duc, détective privé, se pose la même question. Alors qu’il s’apprête à abandonner, la vérité surgit devant ses yeux, qu’il referme aussitôt, assassiné. Il ne reste plus qu’un vieux carnet de notes, des souvenirs, et Marc, son frère, pour découvrir la vérité…

C'est avec "Nymphéas noirs" que j'ai découvert l'écriture de Bussi, mais aussi son talent et son imagination.
Crédule Grand-Duc (il fallait oser !), a pendant dix-huit ans enquêté pour savoir qui est "Libellule", le bébé rescapé du crash du mont Terrible.
On découvre les grand-parents, les riches et les pauvres.
J'ai trouvé un peu facile, les "méchants" riches d'un côté et les "gentils" pauvres de l'autre. N'oublions pas que ces deux familles ont vécu ce qu'il y a de pire, ils ont perdu un fils, une bru, peut-être un bébé, ces familles devront élever les aînés, Marc chez les Vitral, et Malvina chez les Carville, alors ce petit être fragile, ce bébé qui tombe du ciel, c'est pour eux source d' espoir, de réconfort. Tous les moyens sont bons pour "avoir" ce bébé.

Crédule a décidé de faire cadeau de son enquête à "l'enfant rescapée" au moment da sa majorité.
Marc, parfois épié, parfois aidé par Malvina, reprendra le fil de l'enquète. La vie n'a malheureusement pas épargné ses deux aînés, et encore moins Malvina.
Ils iront tout les deux au bout de l'enquète et découvrirons le secret.


C'est en écrivant le titre, et en remarquant que j'avais fait une faute que j'ai compris…Tout était dans le titre, "Un avion sans elle".


samedi 22 novembre 2014

Renaissance

Jean-Baptiste DETHIEUX

Quatrième de couverture

Le psychiatre m’avait pourtant prévenu. Il ne fallait pas tenter cette plongée dans les abîmes, tout seul. Surtout pas ! Vouloir remonter le temps ou plutôt le dérouler sans l’aide d’un compagnon de route, d’un guide de haute montagne aguerri, grand connaisseur du terrain et de tous les pièges que représente cette virée dans les recoins de ma mémoire, c’était de la folie !

Très vite j'ai compris que Jacques Malenc, le héros narrateur était une "personne fragile". Il parle en faisant des phrases très longues, utilisant souvent plusieurs propositions, inconsciemment sans doute pour ne pas agir. Dès qu'il agit, ses phrases sont plus courtes. Sa femme et sa fille ont disparu, la mémoire lui fait défaut. Il est hanté par l'image d'un père, il reçoit des mails étranges sur son ordinateur, entre alcool et hallucinations, notre héros finit par se faire violence et part à la découverte de son passé.
Je n'ai pas, dans ce roman, pris la place du héros. J'ai observé de l'extérieur Jacques Malenc, essayé de comprendre le fonctionnement de son cerveau. Je l'ai lu comme on lit un documentaire. Je pense avoir, malgré moi était influencée par le métier de l'auteur et ma propre approche du monde de la maladie mentale.
J'ai suivi la trame avec intérêt, j'ai aimé le style. 


vendredi 21 novembre 2014

Comment j'ai cuisiné mon père, ma mère… et retrouvé l'amour

S.G. BROWNE
Couverture: illustration de Johann Bodin

Quatrième de couverture

Il n'est jamais agréable de se réveiller sur le sol de la cuisine, baignant dans une mare de glace à la fraise fondue et entouré de plusieurs bouteilles de vin… vides, évidemment. Le trou noir dans mes souvenirs n'est pas, non plus, quelque chose de très réjouissant. Qu'ai-je bien pu faire pour en arriver là ? Et pourquoi ai-je vidé le congélateur de son contenu ? Le mieux est encore d'aller voir par moi-même...
Après vérification, c'est finalement assez logique : pour y ranger les corps de mes parents. Bien…Il va falloir que je me remémore deux ou trois choses, mais par où commencer ? Peut-être par la façon dont je suis devenu un zombie ?
Traduit de l'américain par Laura Derajinski.

J'étais sceptique en commençant ce livre, mais c'est un de mes gros défaut, il faut que je goûte à tout, que je découvre encore et toujours de nouvelles saveurs, de nouvelles couleurs, de nouvelles sensations. Parfois je fais la grimace, parfois je jure qu'on ne m'y prendra plus. Mais le plus souvent je suis ravie de l'expérience.
Les zombies, je ne pensais pas que ce serait ma tasse de thé (en plus je préfère le café!), mais quel plaisir j'ai éprouvé en suivant "Andy" le narrateur!
Se réveiller après un accident, et retrouver le giron familial (alors qu'on était un père de famille responsable), être consigné à la cave, parce qu'un zombie, ça pue, ça se décompose et pire que tout ça fait chuter le prix de l'immobilier, c'est pas exactement comme ça qu'on imagine la mort, croyant ou pas.
J'ai à un moment de ma lecture éprouvé un grand malaise en pensant aux parias de nos sociétés, antiques ou modernes, cette société où des êtres sont considérés comme indésirables par les "respirants" que nous sommes. J'ai songé à tous ces travailleurs qu'on utilise, et à ces femmes, volées à leur vie, bien trop jeunes "déposées" par leur mac sur les routes de notre douce France. J'ai songé à cette pétition ignoble "Touche pas à ma pute" signée par d'ignobles "respirants".

Peu à peu Andy, qui voit un psy, qui participe à un groupe d'aide pour "Zombies", va retrouver confiance en lui et se révolter contre cet état de non-droit.
C'est succulent, plein d'humour et de tendresse.
Je ne savais pas en entamant cet ouvrage que je prendrai fait et cause pour ces "morts-vivants" et que j'y prendrai plaisir. Beaucoup d'humour, de recul mais aussi sujet à réflexion.

lundi 17 novembre 2014

Sortie noire

Christian LAURELLA
Couverture :

Quatrième de couverture

Après vingt ans passés derrière les barreaux, Daniel‚ prisonnier modèle et complètement amnésique‚ bénéficie d'un régime de semi-liberté et trouve un emploi dans une menuiserie. En parallèle‚ deux femmes, dont l'une est au service de l'autre, habitent une maison isolée en province. L’arrivée d'une lettre annonçant la libération de Daniel va bousculer l'apparente quiétude qui semblait être le quotidien des deux femmes et allumer un feu d'enfer dans la maison.

Dix-neuf ans, sept mois et six jours, c’est le temps que Daniel Pessard a passé derrière les barreaux . J’ai suivi avec intérêt sa lente réinsertion hors de la prison. J’ai eu l’impression d’être dans sa tête et de vivre avec lui ses peurs, ses doutes et son questionnement sur les raisons de son incarcération. Mais en vingt ans, il a payé à la société son crime, et tout comme son employeur, Marcel Delplan, j’aurai tendance à penser que l’important c’est le futur.
Pendant sa longue incarcération, Daniel sans doute pour survivre aux brimades des gardiens, pour oublier les murs et le manque d’espace, s’est crée une famille. Il a du mal à se séparer de ce monde imaginaire et se confie à un de ses collègues. Il essaie de savoir pourquoi il est en prison. Il est bouleversant de réalisme. Il trouve pendant sa journée de travail une compassion qui sûrement accentue les brimades commises par ses geôliers.
Elles reçoivent très peu de courrier, alors quand arrive un « recommandé » Marlène, étrange petite vieille de 67 ans, gouvernante chez la non moins étrange Elisabeth Beyrot, 70 ans n’a de cesse de découvrir ce que contient cette missive.
Deux vieilles dames, peut-être pas si dignes, vont nous emmener très loin dans ce qu’il y a de pire chez l’être humain…
J’ai aimé le style et l’écriture de ce roman. Passer de Daniel à Marlène et Elisabeth est très agréable…La lecture est rapide et aisée, et l’intrigue machiavélique à souhait. 

Merci aux éditions Taurnada et à Partage lecture pour ce partenariat.




lundi 3 novembre 2014

Un long moment de silence

Paul COLIZE

Couverture:d’après photos collection de l’auteur

Quatrième de couverture:

2012. À la fin de l’émission où il est invité pour son livre sur la «Tuerie du Caire», un attentat qui a fait quarante victimes dont son père en 1954, Stanislas Kervyn reçoit un coup de téléphone qui bouleverse tout ce qu’il croyait savoir.
1948. Nathan Katz, un jeune Juif rescapé des camps, arrive à New York pour essayer de reconstruire sa vie. Il est rapidement repéré par le Chat, une organisation prête à exploiter sa colère et sa haine.
Quel secret unit les destins de ces deux hommes que tout semble séparer?


Autant le dire tout de suite, j’ai aimé ce roman. J’ai passé quelques heures agréables, sans me lasser, voulant toujours en savoir plus, n’arrêtant ma lecture qu’ à contre-coeur, la reprenant en me disant « que va-t-il se passer… ».
Et pourtant, ça n’était pas gagné. Stanilas Kervyn a tout du héros antipathique. Plutôt intelligent il a réussi dans sa vie professionnelle. Il ne s’embarrasse pas des autres. Ça passe ou ça casse. Avec lui, qu'il s’agisse de sa vie amoureuse ou de sa vie professionnelle, pas de préliminaires, pas de discussions. C’est un fonceur sans état d’âme. Il va reprendre l’enquête qui, alors qu’il n’avait que un an, a couté la vie à son père. Mais au-delà de son enquête pour trouver les responsables de l’attentat, n’est-il pas à la recherche de ce père?
Nous suivons, en alternance, le récit et le parcours de Nathan Katz. C’est donc par « flash back » que procède l’auteur, pour que nous suivions l’itinéraire de ce jeune homme, immigré avec son père à New York et ayant vécu l’horreur des camps.
Il faudra bien que ces deux hommes, d’âges et d’itinéraires si différents se retrouvent.
Ce roman va bien au delà de l’enquête policière. Nous sommes confrontés aux secrets de famille et à cette notion qui oscille entre « justice » et « vengeance ».
« …Mais j’estime que la grandeur de l’homme, ce qui le différencie de l’animal, se mesure à sa capacité à oublier et à pardonner. »

samedi 1 novembre 2014

Le roi disait que j’étais le diable

Clara DUPONT-MONOD
Couverture: Photo JF Paga

Quatrième de couverture

   Depuis le XIIe siècle, Aliénor d’Aquitaine a sa légende. On l’a décrite libre, sorcière, conquérante : « le roi disait que j’étais diable », selon la formule de l’évêque de Tournai…
Clara Dupont-Monod reprend cette figure mythique et invente ses premières années comme reine de France, aux côtés de Louis VII.
   Leurs voix alternent pour dessiner le portrait poignant d’une Aliénor ambitieuse, fragile, et le roman d’un amour impossible.
   Des noces royales à la seconde croisade, du chant des troubadours au fracas des armes, émerge un Moyen Age lumineux, qui prépare sa mue.

Alienor n’a que treize ou quinze ans, parce que sa date de naissance est incertaine, lorsqu’elle épouse Louis VII. Il n’a lui que dix-sept ans, ne devient roi que parce que son frère aîné est mort, il se destinait une vie monacale. Leur mariage avait été arrangé.
Il n’ont vraiment rien en commun. Si Alienor est pleine de mépris et de haine pour ce mari, Louis au contraire tombe amoureux.
L’auteur « rempli les blancs laissés par l’histoire » elle a choisi d’intercaler le « témoignage » d’Alienor et celui de  Louis. 
Alienor n’est pas très sympathique. Elle se veut guerrière et sans merci. Elle semble n’aimer que les conflits, les hommes qui se battent et la violence. 
Louis n’est pas tellement plus sympathique, même si sa préférence va à la diplomatie. Pour plaire à Alienor, il se laisse aller à une violence qui ne lui ressemble pas.
Pendant les quinze ans que durera leur union, ils ne réussiront ni à s’accorder, ni à grandir la France.
J’ai trouvé ce roman plutôt bien écrit, l’alternance des récits allège la dureté des propos. Terminer le roman en faisant parler Raymond de Poitier, seigneur d’Antioche est un plus. Il donne un autre ton à l’ouvrage.

Je remercie Olivier Moss et les matches de la rentrée littéraire sur « priceminister » pour m’avoir proposé de lire ce roman.